Muncef Ouardi

Le Sheik le plus rapide sur glace. Membre de l'équipe Olympique Canadienne. En route pour Sotchi 2014.

Pleins feux (Article tiré du quotidien Le Soleil)

(Québec) En 2012, il est devenu le premier patineur de vitesse longue piste québécois à remporter une médaille individuelle lors d'un championnat du monde depuis 1998. Tout un exploit! Et pourtant, Muncef Ouardi aurait terminé sa carrière dans l'ombre, si ce n'était de sa qualification surprise pour les Olympiques de Sotchi.

Tranquillement, le natif de Charlesbourg d'origine marocaine - son père et sa mère ont adopté le Québec lors de leurs études - commence à donner des entrevues à gauche et à droite, un rôle que ses coéquipiers ont assuré tout au long de sa carrière. Depuis 2010, Laurent Dubreuil était le visage du longue piste à Québec, mais c'est Ouardi qui, le 28 décembre, a été le meilleur lors des sélections pour l'équipe canadienne.

Au 500 m, sa distance de prédilection, il a terminé quatrième, enlevant le dernier laissez-passer disponible sur cette distance. Cinq centièmes de seconde derrière lui, Laurent Dubreuil. Cinq centièmes pour la notoriété. Cinq centièmes de crédibilité.

«La reconnaissance dans les médias ne m'a jamais vraiment importé. Pour moi, la reconnaissance des pairs - des gens du patin - m'est plus importante», indique le patineur de 27 ans à la tignasse bouclée.

«Mais, on ne se le cachera pas... D'aller aux Olympiques apporte un nouveau regard sur vous. Si j'avais eu exactement la même carrière, mais que j'avais été seulement quelques centièmes plus lent lors des sélections, je ne me serais pas qualifié pour les Olympiques et n'aurais pas eu ce qui va venir avec : je serai un athlète olympique à vie.»

Athlète olympique il sera. Et pas seulement au 500 m. Son étonnante prestation du 28 décembre - il a patiné deux courses «parfaites dans les circonstances» - lui a donné des ailes. Ouardi a surpris en terminant, deux jours plus tard, deuxième au 1000 m, une distance qu'il avait un peu délaissée.

«Je suis arrivé aux sélections en sachant que j'avais tout fait. Je suis revenu de mes blessures et j'étais en position de me battre; déjà là, c'était une victoire. Je me rappelle d'être entré à l'Oval le jour des 500 mètres avec le sourire.»

Le sourire du joueur de poker ayant misé tous ses jetons, «all in», non pas avec deux as, mais avec une main plus que satisfaisante. «Ce n'est pas toujours la meilleure main qui gagne, mais faut foncer. Faut avoir confiance.»

Celui qui, il y a quelques années, a justement été un passionné de poker aura gagné son pari. Il deviendra, à Sotchi, le premier patineur longue piste de Québec, depuis 2002, inscrit à plus d'une distance aux Olympiques.

Un atout indéniable pour l'après-carrière d'un étudiant au baccalauréat en intervention sportive à l'Université Laval, qui se verrait bien devenir entraîneur de patin de vitesse.

Les hauts et les bas

Ouardi, qui en sera à ses premiers et derniers Olympiques, a connu, et c'est peu dire, une carrière en dents de scie, où les blessures et les résultats surprenants ont alterné, le définissant comme l'homme des grandes occasions.

À sa dernière année dans les rangs juniors, il se fait remarquer en abaissant le record canadien junior au 500 m. Aucun patineur de 19 ans et moins n'avait, à ce moment, été aussi rapide que lui sur cette distance. Même si la marque n'a tenu que quelques jours, ce patineur de Québec à la peau foncée venait de sortir de l'ombre en s'inscrivant dans le livre des records.

Il connaît par la suite une progression stable et sera identifié, à la fin de la saison 2008-2009, comme un espoir pour les Olympiques de Vancouver. Les mois qui suivront le laisseront avec certains de ses plus beaux souvenirs en carrière, alors que ses coéquipiers de Québec et lui passent les mois de mai à octobre à faire des allers-retours entre Québec et Vancouver.

«Ç'a vraiment été une belle période, mais je regrette qu'on ne se soit pas installés là pour tous ces mois au lieu de toujours revenir à Québec. En décembre, aux sélections olympiques, j'étais claqué, vidé après tout ce voyagement. Je ne me suis pas classé et j'ai manqué ma seule chance de vivre des Olympiques chez moi», se rappelle-t-il, avouant que l'épreuve avait été plus difficile qu'il ne l'avait anticipée.

Ce sont par la suite les ennuis physiques qui viendront marquer sa carrière. L'aine fragile, il sera constamment ralenti par cette blessure chronique l'empêchant d'exercer ses départs. En 2011-2012, alors que son aine l'avait justement gardé sur les carreaux à l'automne, il revient en force à l'hiver et inscrit son seul podium international en carrière lors du Mondial sprint de Calgary.

Ce «plus grand résultat en carrière» a été réalisé alors que ses patins avaient été égarés dans les avions entre Salt Lake City et Calgary et qu'il avait dû patiner avec ses anciennes bottines, livrées seulement deux jours avant la course. De marbre, il avait, une fois de plus, prouvé sa grande force de caractère.

Un an plus tard, toujours avec la même «veine», il se déchire le ligament croisé postérieur en jouant au hockey sur une glace extérieure du Vieux-Québec. Cette blessure le ralentira jusqu'à quelques semaines des sélections olympiques pour Sotchi.

Avec une confiance retrouvée, patinant avec un ligament croisé postérieur en moins, Ouardi se dressera sur la ligne de départ olympique les 10 et 12 février. Sans être l'un des grands favoris, qui sait quelle carte il réussira à mettre sur la table?


Pour lire l'article de François-Oliver Roberge dans le quotidien Le Soleil: www.lapresse.ca/le-soleil/spor⁠…

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